Ce qui fait couler le plus d’encre ce matin, ce qui génère le plus de commentaire, eh bien c’est la démission de Zidane du Real Madrid.
Parce que, certes, la déflagration du jour en Espagne, c’est que le gouvernement Rajoy est en passe d’être renversé.
Mais voilà, c’est ainsi, Zidane écrase tout.
En Une du Parisien qui titre : "il sera sélectionneur", reprenant la prophétie formulée par Didier Deschamps.
En Une également du Maine Libre, du Dauphiné, de la Dépêche du Midi, la Nouvelle République, de l’Est Républicain. Mais aussi du quotidien sportif espagnol Marca qui titre "GraZZias", "gracias por todo", merci pour tout, ajoute le concurrent As.
Il est "Royal" en Une de La Provence. Et l’Equipe parle "du discours d’un roi".
"Zidane part en majesté, écrit Vincent Duluc dans son édito, il a choisi la grande porte parce qu’il a vu l’envers de ce décor royal, il a vu siffler les flèches, s’insinuer le poison, pendant que le stade grondait et que la presse persiflait. Quand est venu le sacre du printemps, conclu l’Equipe, il n’avait pas oublié l’hiver".
Zidane encensé, Zidane loué, Zidane célébré pour "son coup de bluff, écrit Jean-Louis Hervois dans la Charente Libre, assommant médias, supporters, enfants gâtés du Real et tout ce qui compte en dollars sur cette planète foot où l’appât du fric fait loi".
Même analyse dans les Dernières Nouvelles d’Alsace, où Didier Rose salue "celui qui ne quête pas de chèque, et ne se fourvoie pas dans le ressassement du passé (…) démontant ainsi les jugements hâtifs sur ces footeux vus comme des millionnaires infantiles".
"Aucune autre nouvelle sur nos chaines d’infos, écrit Michel Schiffres dans l’Opinion, Un homme s’en va, et tout est dépeuplé. Mais quel destin désormais pour ce héros ?" Et de suggérer qu’il remplisse "d’urgence une mission à son niveau. Se joindre, par exemple, à la rencontre États-Unis/Corée du Nord : Trump, Kim et Zizou, ça, c’est une belle affiche".
Voilà, c’est absurde mais un peu d’ironie, ça fait pas de mal.
Et puis, lui aussi a été mis sur un piédestal, mais sans rien demander : c’est Mamoudou Gassama dont Libération fait le portrait ce matin.
"Le sans-papier sauveteur d’enfant, héroïsé par les Français, naturalisé par Macron et bombardé pompier (…) il ne l’a pas choisi, écrit Quentin Girard, mais il est l’homme du moment, c’est comme ça. Son corps ne lui appartient plus, il est propriété médiatique d’une nation en quête de héros à mythifier".
Et Libération de raconter "les motards de Yann Barthès qui ont manqué de se battre avec ceux de Cyril Hanouna pour qu’il aille d’abord dans Quotidien plutôt qu’à Touche pas à mon poste".
De même, Catherine Barma, grand manitou de l’émission On n’est pas Couché qui ne décolère pas que l’entourage de Gassama ait refusé un face-à-face avec Yann Moix et Christine Angot.
"Mais il n’est pas prêt, explique l’adjointe au maire de Montreuil, on lui demande d’avoir des avis sur la politique d’immigration de Macron mais ce n’est pas son rôle".
"Mamoudou, lui, est fatigué, il répond par "oui", par "non", il se méfie", écrit Quentin Girard qui rappelle "qu’il en a vu d’autres. Lui qui a traversé la Méditerranée, après le Burkina Faso et le Niger. Il a connu les geôles libyennes, les coups et brimades. En l’évoquant, son regard se voile".
Un portrait tout en contraste, à lire donc dans Libération, et que complète la Une de La Croix sur "le défi migratoire de l’Europe".
Trois parcours de migrants.
Celui de Diomandé, 24 ans, parti de Côte d’Ivoire mais qui a fini par rebrousser chemin après avoir passé des semaines enfermé à Tripoli pour être vendu comme esclave.
Arash, 33 ans, torturé en Iran, il a passé 18 mois dans un camp à Lesbos avant d’obtenir le statut de réfugié politique.
Enfin, Aminata, ivoirienne de 40 ans, poussée au départ par un mariage forcé. L’époux, auquel elle se refusait, menaçait de la tuer. "Quelle que soit l’issue de sa demande d’asile, elle est déterminée à rester", écrit le journal auquel elle confie que "c’est une question de survie".
Portraits à lire donc dans la Croix.
Et puis, un reportage rare dans le Figaro, cette fois sur "la guerre oubliée" au Yémen.
Georges Malbrunot décrit un pays éclaté, "livré à une myriades de factions armées, où l’Arabie Saoudite et l’Iran s’affrontent par relais interposés. (…) "Le Yémen n’existe plus !", combien de fois a-t-on entendu cette complainte en une semaine de reportage dans ce pays à côté duquel l’Irak et la Syrie font presque figure de havre de stabilité".
12.000 morts liés directement au conflit, des centaines de milliers de déplacés, un million de cas de choléra recensés, deux millions d’enfants malnutris.
Pas d’eau, pas de gaz pour cuisiner, l’électricité coupée, mais aussi les djihadistes de Daech qui sont arrivés à Aden, puis Al Qaïda, les drapeaux noirs partout, la Croix Rouge qui a dû partir.
"Il n’y a plus d’État, c’est le chaos", résume un habitant.
"Emmanuel Macron organise le 25 juin une conférence internationale pour sauver le Yémen, conclu Georges Malbrunot, il y a urgence".
Un reportage exceptionnel à lire donc dans le Figaro dont le supplément du week-end, le Figaro Magazine fête ses 40 ans d’existence.
Un numéro anniversaire dans lequel Maurice Beaudoin, artisan du lancement en 78, se félicite : "l’esprit pionnier des premières années est resté intact".
"Je vous parle d’un temps que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaitre, écrit Jean Sévillia, qui revient longuement sur ces belles années Fig Mag : "dans les conseils de rédactions, dit-il, les cendriers étaient pleins, nous fumions et nous buvions sur le zinc du bistrot d’en face, dès 85, nous demandions en couverture "serons-nous encore français dans 30 ans", avec une Marianne voilée d’un tchador. Et en décembre 86, Louis Pauwels mit le feu aux poudres en évoquant "le sida mental de la jeunesse"". En page 34, plusieurs couverture emblématique de l’esprit Fig Mag : "les Français et le travail, le hit-parade des tire-au-flanc » en 86, ou encore dès 79, « on n’apprend plus l’histoire à vos enfants".
Jean Sévillia qui conclut sur cet aveu involontaire d’obsolescence : "c’est le monde qui a changé, pas le Figaro Magazine".
Noblesse des convictions ou aveu involontaire d’obsolescence.
Disons qu’à regarder toute ces couvertures aux titres plus alarmistes et grincheux les uns que les autres sur 40 années d’existence, on peut se demander pourquoi une telle constance dans le pessimisme ?
La réponse est peut-être en partie dans la revue le Cercle Psy, qui publie une interview très éclairante de Joël de Rosnay.
Ancien directeur de la recherche à l’Institut Pasteur et enseignant au MIT, il a planché toute sa vie sur les gènes et l’ADN et il explique pourquoi "nous préférons les mauvaises nouvelles aux bonnes : c’est un phénomène darwinien, dit-il. Notre cerveau est davantage programmé pour la survie que pour le bonheur, on retient donc beaucoup plus d’informations négatives pour pouvoir réagir, au cas où elles nous concerneraient, où elles auraient un intérêt par rapport à la prolongation de l’espèce. Et puis, un sociologue de Standford, Christopher Nash, l’a déjà démontré : les opinions positives font passer pour naïf ou bisounours, alors que ceux qui émettent des opinions négatives, alarmistes, paraissent plus intelligents".
Mais paraitre n’est pas être.
Quoi qu’il en soit, en attendant le retour de "La morale de l’info", ça nous donne à méditer pour le week-end.
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