OSTRAVA, République tchèque | À chaque victoire son héros. Le Canada a retrouvé sa place au sommet de l’échiquier mondial du hockey junior, dimanche, en décrochant la médaille d’or au Championnat du monde à l’issue d’une guerre de tranchées remportée par la marque de 4-3 contre la Russie qui sera gravée dans les annales pour longtemps.
Alexis Lafrenière, qui a fini le tournoi avec quatre buts et six aides en seulement cinq rencontres en raison d’une blessure au genou gauche, a été nommé joueur par excellence. Il a aussi reçu le titre de meilleur attaquant, une première pour un Québécois.
Équipe Canada junior (ÉCJ) a eu son lot de héros au cours de son histoire, et dimanche, dans le bouillonnant Ostravar Arena d’Ostrava où des milliers de partisans canadiens étaient entassés, Akil Thomas est entré dans la légende, alors que ses compatriotes venaient de combler un déficit de deux buts en l’espace de deux minutes.
Photo Simon Hastegård (BILDBYRÅN)
Intuition
Utilisé sporadiquement pendant le tournoi, l’attaquant ontarien a réservé sa plus belle manœuvre au meilleur moment, alors qu'il a récupéré la rondelle en pleine accélération devant le gardien Amir Miftakhov avant de lui servir une feinte et de marquer du revers. Ce but avec moins de quatre minutes à égrainer au cadran a déclenché l’euphorie aux quatre coins du vieil amphithéâtre.
«J’étais habituellement super nerveux avant les matchs et, en général, je dois aller vomir, mais aujourd’hui [dimanche], je me sentais bien et je ne sentais pas que j’avais besoin d’une sieste. Je sentais que mon temps était venu.
«J’avais la sensation que Dale [Hunter, l’entraîneur-chef] allait m’envoyer sur la glace et c’est ce qu’il a fait. C’était indescriptible comme moment. Après le match, Dale m’a dit qu’il pensait que j’allais marquer et c’est pourquoi il avait nommé mon nom!» a lancé le joueur le plus populaire d’un océan à l’autre, médaille d’or au cou, après cette finale endiablée.
À 3-3, Hunter cherchait une bougie d’allumage pour en finir pour de bon avec les Russes qui avaient humilié 6-0 la formation canadienne en ronde préliminaire. Membre des IceDogs de Niagara (OHL), l’espoir des Kings de Los Angeles a souvent affronté Hunter qui dirige les Knights de London.
«Je recherchais une force de frappe. Je l’ai vu marquer beaucoup de buts parce qu’il joue dans notre ligue en Ontario et parce qu’on l’avait épié dans le midget. Il a de bonnes mains et on a eu une intuition», a souligné le pilote en point de presse.
Le but de Thomas s’inscrit parmi les moments les plus exaltants d’ÉCJ, au même type que ceux de Jordan Eberle en 2009 en demi-finale et de Tyler Steenbergen en 2018 pour l’or. «Ça va être en haut, c’est sûr», s’est exclamé l’attaquant québécois Joe Veleno.
Deuxième en trois ans
La troupe de Dale Hunter a ensuite résisté à un jeu de puissance des Russes durant lequel elle a eu chaud quand Aidan Dudas a envoyé la rondelle dans les gradins. Or, puisque celle-ci avait touché la caméra installée sur la baie vitrée au centre de la glace, le Canada n’a pas eu à se défendre à seulement trois joueurs.
Il s’agit du 18e titre mondial dans l’histoire du programme canadien des moins de 20 ans, le deuxième en trois ans. Sixièmes l’an passé, les représentants de l’unifolié n’étaient pas grimpés sur le podium en sol européen depuis leur triomphe en finale en 2008, qui était aussi survenu en République tchèque.
À sa quatrième expérience comme adjoint, André Tourigny a enfin pu savourer l’ivresse de la victoire.
«À toutes les fois que le Canada gagne, les gens oublient à quel point c’était difficile, à quel point on a eu de l’adversité. Toutes les années, c’est des retours, des matchs en fusillade, des matchs en prolongation ou des situations dans le tournoi où on pense que tout est perdu, que tout est fini. Je ne sais pas, les fantômes du Canadien sont rendus avec nous... On a trouvé une manière de gagner», a reconnu le pilote québécois.
Un rêve devenu réalité pour Lafrenière
OSTRAVA | Alexis Lafrenière avait visualisé ce moment avec le chandail de la formation canadienne des milliers de fois. Dimanche, bien loin de son Saint-Eustache natal, en République tchèque, ce rêve est devenu réalité.
« C’est gros, j’ai rêvé à ça un peu toute ma vie. J’ai de la misère à y croire un peu. On a fait face à beaucoup d’adversité avec ce groupe-là et on savait qu’on était capables de revenir. Ça a été un groupe incroyable dans la façon avec laquelle on s’est amélioré tout au long du tournoi. C’est vraiment spécial et c’est le fun de gagner », a réagi le capitaine de l’Océanic de Rimouski après avoir transformé l’unifolié en cape pendant la remise des médailles.
Les 23 hockeyeurs formant la sélection nationale ont donné l’impression que rien ne les affectait au cours de ce parcours parsemé d’embûches où les blessures du principal intéressé et du capitaine Barrett Hayton, des joueurs malades, la suspension de Joe Veleno ainsi que l’expulsion de Nolan Foote ont meublé le quotidien de la quinzaine.
« On a vraiment formé un groupe serré. C’est fou comment, en quelques semaines, on peut tisser autant de liens. C’est vraiment le fun de célébrer avec eux, ce sont comme des frères », a poursuivi celui qui est considéré par plusieurs comme le plus bel espoir de la prochaine séance de sélection de la LNH.
Il a rendu mérite à ses partenaires pour son titre de joueur par excellence. Lafrenière faisait partie des cinq vétérans ayant vécu la déconfiture de l’an passé à Vancouver.
« Alexis a eu un impact incroyable. C’est un joueur qui est là dans les moments décisifs. Il fait des jeux sous pression, et lui, de la pression, je ne sais pas s’il connaît ça. Il aime ça. Il a fait des gros jeux à des moments clés, et on l’a jamais senti paniquer. Il amène tellement d’enthousiasme. Il a lancé un gros message dans ce tournoi », a souligné l’instructeur adjoint André Tourigny.
Hayton se lève
Ralenti par une épaule gauche endolorie à la suite d’une mauvaise chute en demi-finale, Hayton n’a jamais eu l’intention de rater le rendez-vous ultime. Son but égalisateur à la 52e minute en avantage numérique alimentera à jamais les faits saillants du tournoi.
« Le personnel médical a fait un travail incroyable. J’étais avec eux pour qu’ils me donnent l’opportunité de jouer. Il y avait de la douleur, mais avec toute l’ambiance qu’il y avait, tu ne la ressens pas trop et, dans le feu de l’action, tu ne ressens pas trop ces blessures », a expliqué l’attaquant des Coyotes de l’Arizona qui faisait un retour avec ÉCJ cette année. Il a amassé 12 points, dont six buts.
La Suède a remporté le bronze contre les Finlandais.
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